L’Acadie
Un nom mythique mais je dois avouer mon ignorance. Une vague idée, une référence au Nouveau-Brunswick et à sa péninsule acadienne, à la musique. Se plonger dans son histoire fut l’une des grandes surprises de ce début de périple.
Je ne vais pas vous faire l’histoire de l’Acadie mais je vais essayer de vous donner les clées pour comprendre l’Acadie et le peuple acadien.
En partance pour la France, il y a un gros pavé de 400 pages mais il est trop lourd pour que je le garde dans mon sac le temps de le lire alors je vais faire l’article à partir de ce que j’ai retenu des différents sites que j’ai visité.
La Nouvelle-Ecosse est le berceau de l’Acadie. Un territoire sans frontière qui a donné naissance à un peuple de 3 millions de personnes à travers le monde.
1604, Samuel de Champlain et le Sieur de Mons installent une colonie à Port-Royal, à l’entrée de la baie d’Annapolis, un bras de la Baie de Fundy. Il s’agit de la première colonie de la Nouvelle-France.
"L'habitation", Port Royal
Quelques années plus tard (1635), alors que « l’habitation » a brulé, les colons (une cinquantaine de familles) s’installent un peu plus en retrait dans la baie d’Annapolis, c’est le Fort Charles à Annapolis Royal.
Fort St Charles, Annapolis Royal
De cette implantation va naître une société nouvelle, une société rurale de paysans qui transforment les prés salés de la baie de Fundy en riches terres agricoles grâce à un système de digues et de vannes en bois : les aboiteaux. Les amérindiens les dénomment les défricheurs d’eau.
Les aboiteaux et les vastes terres du fond de la baie
Pendant un siècle, au grès des conflits entre le royaume de France et le royaume d’Angleterre, le territoire de la Nouvelle-Ecosse va changer onze fois de statut.
Mais cela n’affecte pas le développement de la société acadienne qui croit doucement.
1713, Traité d’Utrecht : le sort de l’Amérique est scellé en Europe dans le cadre des conflits entre Français et Anglais. La Nouvelle-France est cédée à l’Angleterre (pas l’île Royale, actuel Cap-Breton).
Les acadiens sont néanmoins autorisés à rester en Nouvelle-Ecosse. Ils conservent leurs terres, la liberté de culte (catholique) et s’engagent à rester neutre en cas de conflit entre français et anglais.
Période de bonheur qui va voir la population quadruplée au cours des quarante années suivantes. Toutefois, ces riches terres et cette réussite suscitent une certaine jalousie.
Halifax est crée en 1749 et Charles Lawrence, gouverneur de la province, ne voit pas cet essor de façon positive et va mettre à exécution un plan minutieusement élaboré avec la complicité des colons britanniques de la Virginie.
1755, le Grand Dérangement : Prétextant du conflit de la guerre de Sept Ans, Charles Lawrence demande aux acadiens de prêter allégeance à la couronne britannique et de renoncer à leur liberté de culte. Devant leur refus, il organise la déportation des acadiens.
Vue depuis le Fort Beauséjour
Après la chute du Fort Beauséjour, celle-ci commence à Grand Pré par l’enfermement des hommes dans l’église. Les acadiens sont déportés dans des conditions déplorables vers la France, les prisons d’Angleterre, les côtes de la Virginie. Sur une population d’environ 25000 personnes, 10000 sont déportées, 6000 vont en mourir. Certains fuient vers le nord du Nouveau-Brunswick, au Québec, d’autres tentent de se cacher en forêt et quelques villages isolés sont épargnés (sur l’île du Cap-Breton).
Le site de Grand Pré
Avec la chute de la forteresse de Louisbourg, sur l’île Royale (Cap-Breton), c’est la fin de l’Acadie.
En 1764, à la fin de la guerre de Sept Ans, les acadiens sont autorisés à revenir en Nouvelle-Ecosse mais ils ont perdu la possession de leurs terres au profit des colons britanniques.
Le peuple acadien
Placé sous la protection du royaume de France, les acadiens emprisonnés en Angleterre et ceux de France sont regroupés en France.
Mais l’adaptation est rude. Ils ne sont plus français. Certains retournent en Nouvelle-Ecosse et sur la côte du Nouveau-Brunswick, passant d’agriculteurs à pêcheurs.
D’autres, dans le cadre d’implantations organisées par le royaume vont en Louisiane, pour donner naissance aux acadiens dénommés cajuns.
Eparpillés à travers le monde, de la France au Canada, de la Louisiane aux îles Malouines, il forme un peuple dont la prise de conscience est en partie due à deux personnes :
Henry Wadsworth Longfellow publie, en 1847, Evangeline : A Tale of Acady, qui raconte une séparation au moment du Grand Dérangement. Ce poème va faire connaître à la population anglophone une page de l’histoire acadienne et va réveiller une prise de conscience pour un nationalisme acadien.
Statue d'Evangeline devant l'église (reconstruite) de Grand-Pré
Le père Camille Lefebvre fonde le collège Saint Joseph, en 1864, à Memramcook (Nouveau-Brunswick). L’établissement offre un enseignement supérieur en français et permet la formation d’une élite acadienne.
En 1881, la première convention nationale regroupe plus de 5000 acadiens à Memramcook. L’Acadie se dote, en 1884, d’un hymne national, l’Ave, Maris stella, d’un drapeau, Notre-Dame de l’Assomption devient leur Sainte Patronne et le 15 août est jour de fête nationale.
On retrouve encore quelques villages acadiens en Nouvelle-Ecosse mais ils sont majoritairement implantés sur la côte du Nouveau-Brunswick et dans le fond de la baie de Fundy. Très facilement reconnaissable avec des drapeaux qui flottent au vent un peu partout.
Il est intéressant de voir comme la notion de communauté joue pleinement dans ces villages. A Chéticamp (Cap-Breton), plusieurs établissements comme l’épicerie, un restaurant sont communautaires. Autre symbole même si le fait religieux est moins important que par le passé, l’église catholique.
Voilà pour ce petit aperçu qui vous invite à vous plonger dans cette histoire, voir à venir visiter le berceau de l’Acadie. Il manque à ma visite des sites importants, la forteresse de Louisbourg et la Péninsule acadienne au Nouveau-Brunswick, mais entre la météo (pluie, froid), les sites fermés (tous) – j’ai bénéficié d’une visite privée au monument Lefebvre -, l’absence d’hébergements (du moins ceux abordables) et les kilomètres, il faut faire des compromis.
Le monument Lefebvre est érigé, à la demande d’anciens élèves, en 1896 pour rendre hommage au Père Camille Lefebvre pour sa contribution à la culture acadienne.
Lorsque le Père Lefebvre s’éteint en 1895, Pascal Poirier, un de ses anciens étudiants, écrit : « Quelle grande perte nationale …, Plus que quiconque, cet homme a été notre bienfaiteur … qui nous a délivrés de l’esclavage de l’ignorance. »
Le bâtiment a une fonction commémorative et culturelle avec son théâtre à l’acoustique exceptionnelle (de grands noms sont venus se produire, Yehudi Menuhin…). Une cinquantaine de représentations ont été donné l’année dernière par des artistes acadiens et autres. Du folklore, au théâtre en passant par l’opéra.